L’abbé René Tessier, rédacteur en chef de la revue Pastorale-Québec, analyse l’actualité religieuse depuis plusieurs décennies. Quel regard porte-t-il sur la visite papale? Voyez ses commentaires dans cette série de quatre blogues.

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(1ère de 2 parties)

Du 24 au 29 juillet, le pape François s’est permis de nous proposer un itinéraire spirituel qu’on peut qualifier d’holistique. Ceci a paru agacer certains commentateurs, visiblement obsédés par les excuses qu’il aurait fallu répéter continuellement et le choix de mots pour désigner tout ce qui a pu se passer dans nos pensionnats pour autochtones. Je suis clairement en désaccord avec ces mauvais gérants d’estrade, moi qui, personnellement, ai toujours détesté la répétition.

Un des curés avec lesquels j’ai œuvré en paroisse avait pour principe : « Les messages importants doivent être répétés trois fois », ce qui se défend après tout, surtout dans certaines situations où les émotions brouillent la communication; mais, après quelques semaines, je n’ai pu m’empêcher de lui répondre : « Mais là, ça fait déjà quatre fois que tu l’affirmes devant moi ». Il a compris, de son propre aveu, que je n’étais pas si stupide et que, le plus souvent, comme bien d’autres, je peux saisir du premier coup (ici, vous avez entièrement le droit d’en rire).

La démarche du Pape recelait une progression remarquable. Le lundi matin, il rencontrait des leaders autochtones sur le site d’un ancien pensionnat et soulignait avec eux l’importance de savoir faire mémoire. Pas de catéchèse élaborée cette fois-là, mais un geste symbolique fort : la remise des mocassins qu’on lui avait apportés à Rome. Ce faisant, il nous invitait tous et toutes à « Marcher ensemble » (le thème de la tournée) sous le regard de Dieu. Et il a demandé pardon… à trois reprises dans son allocution !

Le même jour, dans une paroisse d’Edmonton qui a su bien harmoniser les traditions spirituelles des Autochtones et du catholicisme, « une maison pour tous, ouverte et accueillante, comme doit l’être (l’ensemble de) l’Église (catholique) », il a osé entrevoir, malgré « les blessures si douloureuses », la perspective d’une réconciliation avec soi, avec Dieu et avec autrui. Il était parfaitement clair, tout de même, que cette réconciliation ne peut pas être imposée, pas plus que le pardon, qui peut survenir au terme d’un long processus.

Mardi matin, 26 juillet, c’était la fête des saints Anne et Joachim. Celui qui a décrété dans l’Église universelle la célébration annuelle de la Fête des grands-parents a puisé dans les spiritualités autochtones la vénération de ceux-ci pour les aînés. Ce faisant, il nous suggérait fortement de nous mettre à leur écoute, nous qui considérons trop souvent les personnes âgées comme peu utiles et ne les visitons et/ou consultons que très peu. En après-midi, au sanctuaire traditionnel du lac Sainte-Anne, comme Jéss au bord du lac de Tibériade, il a recommandé de puiser aux sources de la vie et d’entrer dans la purification. Je retiens aussi cette scène inoubliable du Pape priant silencieusement sur le bord de l’eau en ce lieu sacré.

Restaient encore les étapes de Québec et d’Iqualuit (notre prochain blogue).

René Tessier