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Colloque – Pour une guérison de la mémoire au Québec

Pour vous donner le goût de participer au colloque « Pour une guérison de la mémoire au Québec » organisé par l’Observatoire Justice et Paix, qui aura lieu le 25 juin prochain à l’Université Laval avec, entre autres, Bernard Émond, Éric Bédard, Anne Leahy et Mathieu Bock-Côté, nous vous invitons à visionner ici une série de capsules avec l’un des conférenciers du colloque, Éric Bédard, historien (profils de tous les conférenciers, horaire du colloque et inscriptions : www.observatoirejusticepaix.org) :

Rencontre avec le père Martin Lagacé, initiateur de l’Observatoire Justice et Paix, et la coordonnatrice aux communications du Colloque, Emmanuelle Gagné :

Ouverture du colloque le 24 juin dès 19h au sous-sol de l’église Saint-Thomas-dAquin (2125, rue Louis-Jolliet, Québec) : célébration, exposition de l’artiste québécoise Stéphanie Chalut (www.stephaniechalut.com). Bienvenue!

 

Nouveau livre sur François de Laval écrit par Sœur Doris Lamontagne, pfm

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La chanoine Jacques Roberge, supérieur général du Séminaire de Québec, Sr Doris Lamontagne pfm et le cardinal Gérald Cyprien Lacroix. Photo de Daniel Abel

Envoyés à toutes rencontres

Actualité des repères missionnaires de François de Laval

Publié par le Séminaire de Québec

En canonisant François de Laval en 2014, le pape François confirmait l’actualité du témoignage missionnaire de l’Apôtre en Amérique. Ce livre propose une nouvelle lecture de la vie de saint François de Laval et dégage des repères missionnaires qui l’ont guidé. Les repères de François de Laval s’enracinent dans le sillon de l’Église primitive, puisqu’il a la conviction profonde que l’Église de la Nouvelle-France a reçu un don similaire. Au même titre que de nombreux missionnaires oeuvrant depuis deux mille ans partout dans le monde, François de Laval est conscient que la Mission est l’oeuvre de Dieu et cherche constamment à en être un digne instrument. L’époque et le contexte ont bien changé, mais l’auteure a la ferme conviction que les repères missionnaires de cet homme s’inscrivent à la fois dans une dynamique de continuité et de créativité. Ses repères peuvent nous servir d’assises solides encore aujourd’hui.

Le livre a été lancé le jeudi 16 juin au Séminaire de Québec, date historique de l’arrivée de François de Laval le 16 juin 1659.

Il est en vente dès aujourd’hui, vendredi 17 juin, au Centre d’animation François-De Laval à la basilique-cathédrale Notre-Dame de Québec.

Pour revoir une conférence de Sr Doris au sujet de François de Laval (2013), sur son action missionnaire : http://www.ecdq.tv/fr/videos/1c6a0198177bfcc9bd93f6aab94aad3c

Congrès charismatique national dans l’unité des chrétiens du 16 au 19 juin à Québec

CCN

Le cardinal Gérald Cyprien Lacroix archevêque de Québec et le pasteur Grant Freake de l’église ‘Evangel Pentecostal Church – Québec’, sont heureux d’accueillir à Québec dès ce soir le Congrès charismatique dans l’unité des chrétiens. Pour une première fois au Québec, un congrès charismatique rassemble catholiques et pentecôtistes dans l’organisation et dans l’animation.

Organisé par le Conseil canadien de Renouveau charismatique, le colloque se déroulera sous le thème : « Que tous soient un, comme toi, Père, tu es en moi et moi en toi, qu’ils soient un en nous eux aussi, pour que le monde croie que c’est toi qui m’as envoyé. » Jn 17, 21.

LIEU : Externat St-Jean-Eudes, 650, av. Bourg-Royal, Charlesbourg, Québec

DATE : 16, 17, 18 juin 2016

Les principaux conférenciers seront :

Cardinal Gérald Cyprien Lacroix, archevêque de Québec

Pasteur Carlos Payan (Paris, France)

Pasteur Jean-Luc Tachsel (États-Unis)

Dr Mary Healy (Maryland, États-Unis)

Henri Lemay, président du conseil canadien de Renouveau charismatique

Pour plus d’information, visitez le www.renouveaucharismatique.ca.

Lien direct vers l’événement.

Texte de la conférence sur la souffrance de Mgr Couture

Le 11 mai 2016
R.C.V.

Document au format PDF

Vidéo de la conférence sur ECDQ.tv

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LA DOULEUR ET LA SOUFFRANCE

Introduction

Ce n’est pas moi qui ai choisi le titre des propos que je vais vous livrer, pas plus que n’ai pas pris l’initiative de cet entretien. C’est au supérieur des prêtres de ma nouvelle résidence qu’il faut attribuer cette volonté et c’est au Conseil presbytéral diocésain, si j’ai bien compris, qu’on a suggéré que la vaillante équipe de l’ÉCDQ-TV puisse l’offrir sur le web. Vous m’en voyez honoré, mais un peu stressé à l’idée de couvrir convenablement un sujet aussi vaste et pertinent à la fois, compte tenu de mon auditoire direct de la résidence Cardinal-Vachon où l’on côtoie la souffrance et de la place qu’occupe dans l’espace public l’aide médicale à mourir. Je m’attarderai surtout sur le sens chrétien de la souffrance, mais je ne peux ignorer, dans le contexte actuel, la question brûlante et lancinante des soins palliatifs versus l’euthanasie active.

Monsieur l’abbé Jacques Pelchat m’a même dicté – au sens modéré du terme — le titre de mon entretien : « la douleur et la souffrance ». Un confrère m’a fait la réflexion : « Ça se ressemble pas mal ». Je lui ai répondu : « Heureusement, sinon je risquais fort de déborder mon temps de parole! » Un écueil que j’ai toujours eu bien de la misère à contourner! De toute façon, je vais sans doute déborder un peu la demi-heure classique de l’émission télévisée, sachant que les internautes bénéficieront des coupures de mes digressions futiles.

I-Douleur et souffrance

Devant ma grille de mots croisés, les deux mots seraient de purs synonymes. Mais, il vaut la peine de rappeler les nuances qui les distinguent.

Grosso modo, le mot « douleur » réfère d’abord au mal physique. Dans la maison où je m’adresse à vous, à l’étage supérieur de l’unité de soins, l’infirmière vous demandera tout naturellement : « Sentez-vous encore de la douleur dans votre dos, dans vos jambes, dans votre estomac? » Mais ailleurs, sur le coup d’un deuil, d’un drame familial, d’un sentiment d’abandon ou d’inutilité, le psychologue, l’aidant naturel, le conseiller spirituel vous demanderont plutôt : « Ça vous fait souffrir, n’est-ce pas? » C’est dire que si les deux mots – douleur, souffrance – se rejoignent dans leur sens générique, chacun a une application spécifique plus précise. Mis ensemble, ils recouvrent une réalité globale qu’on retrouve dans le mot « mal ». On dira aussi bien : « J’ai mal aux yeux » que « j’ai mal à l’âme ». Pour manifester sa compassion à sa fille, Madame de Sévigné, la classique de la littérature épistolière, lui écrivait : « J’ai mal à votre estomac! » Somme toute, quel que soit le mal qui nous atteint, il nous cause de la souffrance physique ou morale, souvent les deux à la fois. Et l’une ou l’autre peut paraître insupportable et conduire dans certains cas à penser au suicide pour s’en délivrer, qu’il soit personnel ou assisté. À toute fin pratique, je donnerai dans mes propos la même acception globale aux mots « douleur » et « souffrance », comme dans le langage courant.

II- Le sens chrétien de la souffrance

On n’est pas à l’abri des notions faciles lorsqu’on parle de sens chrétien de la souffrance.

Dans notre jeunesse, nous avons peut-être entendu la phrase : « Il faut souffrir pour être belle ». C’était pour justifier que les femmes s’étouffent dans des corsets qu’elles portaient pour améliorer leur profil corporel. De son côté, ma grand-mère bien aimée reprochait à ma mère de trop gâter ses enfants quand elle soignait nos rhumes ou nos bobos : « Alma, arrête de les dorloter! » disait-elle. « Il faut qu’ils apprennent à souffrir ». Elle se faisait peut-être l’écho d’une certaine éducation religieuse voulant qu’il fallait souffrir « pour gagner son ciel ».

J’ai personnellement connu au noviciat de ma communauté l’usage de la « discipline ». N’allez pas croire qu’il s’agissait seulement d’un équilibre de vie, ou même d’un régime austère emprunté à la vie monastique, mais bien d’un fouet fait de lanière de cuir pour se flageller à l’appel d’une cloche, pendant une minute chaque vendredi soir avant de se mettre au lit. Le rythme des coups était heureusement laissé à la discrétion de chacun… N’empêche qu’un confrère zélé avait dû gagner un lit de l’infirmerie après l’exercice. Pour ma part, je vous avouerai candidement qu’il m’est arrivé d’évaluer au son la vigueur du martyre chez les voisins de nos cellules fort mal insonorisées! À la même époque, le port du cilice, cette camisole d’étoffe rude, était assez répandue. On aurait révélé indiscrètement qu’on en avait trouvé un exemplaire dans les effets personnels du pape Paul VI. La source, comme disent les journalistes, ne précise pas le degré d’usure de la précieuse relique…

C’était l’époque ou même les médecins répugnaient à recourir trop facilement aux analgésiques. Une dame, dont je ne peux suspecter l’intégrité, me racontait que, lors d’un accouchement laborieux, elle avait réclamé un « calmant ». L’obstétricien l’en avait dissuadé en disant : « Madame, la femme enfante dans la douleur. C’est ça depuis le Paradis terrestre. » Vous reconnaissez la parole de Jésus interprétée hors contexte.

Il n’en fallait pas plus pour que des esprits malveillants assimilent ce que l’on appelait la mortification au masochisme. Il faut avouer d’ailleurs que le terme mortification sonnait pire que le mot masochisme, puisqu’il évoquait la recherche de la mort, alors que le masochisme se limite à rechercher la souffrance!

En réalité, la mortification traduisait plutôt ce que saint Paul appelait « faire mourir le vieil homme en nous » ou « mourir au péché », ce qui de soi n’implique aucunement de se faire violence physiquement.

N’empêche que dans les pays de culture catholique, la médecine ne s’est mise que tardivement à prescrire de la morphine en fin de vie ou en cas de douleur chronique. Trente ans après que Pie XII eût donné son aval aux soins palliatifs, alors que Jean-Paul II se prononçait très clairement contre l’acharnement thérapeutique, une certaine divinisation de la souffrance pouvait justifier, la malveillance aidant, le dicton français : « Catho rime avec maso. » Une réaction au fait que l’Église catholique – je parle en l’occurrence de l’Église enseignante — s’est longtemps appesantie sur la douleur, soit pour inviter à la résignation, soit pour la glorifier ou lui donner une valeur rédemptrice mal perçue. Il en est résulté ce qu’on a appelé le « dolorisme », i.e. une spiritualité de justification et du culte de la douleur. Aux yeux des détracteurs du catholicisme, qui pullulent dans notre société québécoise et dont nos médias diffusent largement les propos, l’omniprésence des symboles religieux, les crucifix et les crois-bijoux spécialement qui évoquent le supplice épouvantable infligé à Jésus de Nazareth, « l’homme de douleur » comme le prophète Ézéchiel (53.3) appelait déjà le Messie, sans compter la pratique très répandue du chemin de la Croix devant les 13 stations de nos églises et chapelles auxquelles on a ajouté la quatorzième de la résurrection pour déboucher au moins sur le mystère fondamental de notre foi.

Pourtant représenter la souffrance n’est pas forcément la glorifier pour elle-même. Il faut bien distinguer ce que Jésus fait de la souffrance et ce que l’on fait (ou que l’on a fait) de la souffrance de Jésus, selon l’observation très juste du théologien Jean-Pierre Manigne. Jésus n’a rien d’un doloriste, au sens où il ne se réjouit pas de la souffrance, qu’il ne la considère pas comme un châtiment divin, qu’il ne se résigne pas ni n’exhorte à se résigner. Il fait preuve d’une compassion universelle, mais d’une compassion active qui prend en compte la faim, la maladie, le désarroi des foules, l’inquiétude spirituelle des individus. Son Évangile est la « bonne Nouvelle » que les aveugles voient et les boiteux marchent. Plutôt que d’exalter la douleur, il s’attache à la faire reculer, ce qui n’empêche pas de la trouver féconde quand cela est le prix à payer pour l’amour. Et nous savons par expérience qu’aimer, c’est accepter de souffrir.

Si la chrétienne, le chrétien ne se réjouit pas de la souffrance, la joie n’en demeure pas moins la marque authentique de celui ou de celle qui se croit sauvé par la souffrance du Christ. Le philosophe, Nietzche, n’en attendait pas moins des témoins crédibles du Christ. On connaît sa réflexion mordante à l’adresse des chrétiens : « Il faudrait qu’ils aient un air plus sauvé pour que je croie en leur sauveur. »

Mais la joie peut-elle coexister avec le mal, qu’il s’agisse de la souffrance physique ou de la faute morale? De soi, le mal est impossible à comprendre et à aimer. François Varillon a bien démontré que toute tentative philosophique pour justifier le mal et « innocenter Dieu qui ne veut pas le mal mais le permet seulement » ne peut qu’échouer. Car le mal est injustifiable sous toutes ses formes. C’est précisément parce qu’il est injustifiable que le mal est mal. « Il est un non-sens en soi », ponctue le théologien. Le permettre serait inacceptable de la part d’un Dieu qui n’est qu’amour.

On ne doit pas chercher à justifier la souffrance, encore moins absolutiser sa valeur sanctificatrice : il faut la combattre. Inutile de la traiter comme un problème, puisqu’elle n’a pas de solution, poursuit en substance François Varillon. Son collègue théologien, Bernard Sesboué, en rajoute : « La souffrance, prise en elle-même, n’a aucune valeur positive. Elle est un scandale opaque. C’est pourquoi nous devons la combattre toujours et partout, au nom de la règle d’or de l’Évangile, le commandement de l’amour. »

À vouloir « innocenter Dieu » à tout prix, on risque de le coincer. Ainsi, prétendre que Dieu « permet » le mal comme une étape nécessaire pour parvenir à une meilleure harmonie du monde ou de la création, c’est se satisfaire froidement d’une justification douteuse, qu’il s’agisse d’une guerre dévastatrice, d’un incendie de forêt ou d’une maladie paralysante.

Des formules maintes fois reprises ont été inventées pour traduire cette approche du mal physique ou moral :

« La guerre est l’enfantement de l’histoire »

« Dieu éprouve ceux qu’il aime »

« L’épreuve est bienfaisante »

« La faute engendre la conversion »

Il y a une part de vérité dans ces formules stéréotypées, plus ou moins compatissantes, à la limite odieuse pour les personnes qui subissent les assauts du mal. Mais elles suscitent toutes la même interrogation. Le mal peut-il faire partie du plan de Dieu? Peut-il être objet de l’intention divine?

Ce questionnement est sous-jacent au dialogue de Job avec ses amis qui le soupçonnent d’avoir mérité ses malheurs à cause de ses péchés. Le saint homme proteste de son innocence, démontrant ainsi fort opportunément ce qu’il y a d’odieux à lire dans la souffrance un jugement de Dieu.

Il serait plus juste d’attribuer à la liberté humaine une part de la responsabilité du mal qui l’afflige. En bien des cas, en effet, l’être humain se punit lui-même de ses dérogations aux lois de la nature ou du décalogue. Le fumeur invétéré qui encrasse ses poumons, le buveur excessif qui engorge son foie, le noceur qui multiplie ses partenaires sexuels, l’athlète qui s’adonne à certains sports extrêmes, le champion olympique qui recherche la performance dans les anabolisants, le joueur compulsif qui hante les casinos, le fou du volant qui pousse son bolide à vitesse maximale, plus généralement monsieur et madame Tout-le-monde qui font fi des règles élémentaires d’une saine alimentation ou des prescriptions de leur médecin : toutes ses personnes, en abusant de leur liberté, s’exposent à des misères de toutes sortes. Elles seraient bien mal venues de mettre en cause la bonté de Dieu à leur égard.

Mais l’enfant atteint de leucémie, la vieille dame heurtée par un chauffard, les passagers qui périssent dans la chute d’un avion, ne peuvent être renvoyés à leur responsabilité personnelle. Il en est ainsi des victimes d’un ouragan, d’un tremblement de terre, d’un raz-de-marée, d’une inondation. Leur situation s’apparente à celle de Job en proie au mal suprême qu’est la souffrance de l’innocent. En l’assumant comme il l’a fait dans la Passion, Jésus a voulu aller aux creux de la détresse humaine pour lui donner un sens.

Non pas qu’il faille sacraliser la souffrance comme telle, pas même celle du Christ, ni en évaluer l’importance par sa quantité. On ne sait pas par ailleurs si Jésus a été l’homme le plus souffrant dans l’histoire de l’humanité. Le Père Congar affirmait un jour : « Ce n’est pas la souffrance de Jésus qui nous a sauvés, c’est l’amour avec lequel il a vécu cette souffrance. »

Mais, ne l’oublions pas, avant de se livrer au sacrifice de sa vie, le Fils de Dieu a réagi sainement, comme tout humain normal aux prises avec le mal physique ou moral qui l’assaille : « Que ce calice s’éloigne de moi ». Bien plus, même après sa soumission à la volonté de son Père, il continue à chercher le soutien moral de ses proches, à se plaindre de leur peu d’attention à son angoisse, voire à ressentir humainement l’abandon de son Dieu : « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné? »

Si le « Fils de l’homme » a connu pareils sursauts de sa nature humaine, comment s’étonner de la révolte qui s’exprime chez le commun des mortels devant l’acuité de la douleur, l’imminence de la mort ou la lourdeur de l’injustice? La situation doit nous inviter à la compassion tangible et silencieuse plutôt qu’aux propos lénifiants ou moralisants. La sympathie humaine saura frayer un chemin à la grâce divine, tout comme l’amour du Christ a « converti » le sens de la souffrance. Non pas en la justifiant, mais en lui donnant le visage de l’amour, tant de l’amour manifesté par le Christ souffrant que de l’amour des humains qui acceptent de souffrir avec lui. C’est cet « être avec » qui importe et non l’intensité de la souffrance.

Saint Paul ira jusqu’à dire : « Je trouve maintenant ma joie dans les souffrances que j’endure pour vous » (Col.1, 24). N’est-ce pas le condensé des béatitudes et le secret du bonheur vécu par tant de saints et saintes qui « ont accompli dans leur propre chair ce qu’il reste des épreuves du Christ? »

Pour les lecteurs et les lectrices qui veulent approfondir les réflexions qui précèdent, je recommande vivement la lecture d’un ouvrage moins aride que les nombreux écrits des théologiens sur le thème que j’ai à peine effleurer. On appréciera sûrement comme moi le livre d’Olivier Legendre : Le cri de Dieu. Un petit chef-d’œuvre de spiritualité chrétienne qui humanise, sans le déformer, le sens de la souffrance vécue avec le Christ.

IIIUne application à la saga de l’aide médicale à mourir.

Plutôt qu’un troisième point de mon entretien, voyez-y une application de ce qui précède à la délicate question de l’aide médicale à mourir.

C’est une patate chaude dans les mains de nos politiciens et de notre système de justice. Alors qu’on était habitué à ce que les tribunaux invalident des lois trop permissives dans différents domaines, voilà que la Cour suprême dit au gouvernement fédéral : « Vous n’avez pas le droit de refuser à un patient en fin de vie de demander à son médecin de l’aider à mourir ». Les sondages auprès de la population sont largement favorables à ce qu’on appelle « l’aide médicale à mourir dans la dignité ». Certaines associations médicales ont exprimé des réticences; les évêques du Canada et du Québec ont clairement exprimé leur opposition à toute forme d’euthanasie active. Il faut reconnaître que leurs interventions sont en porte-à-faux avec l’opinion publique, très probablement même avec le sentiment des personnes qui vont continuer à se dire catholiques au prochain recensement, à supposer que la question soit posée.

Geste très révélateur : un seul député du parti au pouvoir à Ottawa s’est opposé au projet de loi qui est en voie d’être soumis au vote parlementaire. Il s’agit du député autochtone, Robert Falcon Ouellette, francophone par surcroit, docteur en anthropologie de l’Université Laval, et député de Winnipeg.

« Le Devoir » de lundi dernier lui a consacré un reportage. L’anthropologue tient un discours qui s’approche de celui des évêques sans les citer, car les médias semblent bouder totalement leurs nombreuses interventions collectives et personnelles. Seul l’évêque de Toronto a réussi à percer dans la presse anglophone du Canada.

Je vous lis des extraits de l’entrevue donné par le député dissident : « On est dans une société jetable. Nos cellulaires, nos produits, tout. On ne répare même plus, on jette et on remplace nos affaires achetées à bon prix. Est-ce maintenant rendu dans nos valeurs plus profondes au sujet des personnes et la valeur qu’elles ont dans la société? »

Au fond, toute la question du suicide assisté repose sur la façon de vivre la souffrance. Ce que les gens souhaitent, c’est de ne pas souffrir. Pourtant les soins palliatifs, dont on devrait pouvoir bénéficier partout, permettent de supprimer pratiquement toute douleur. C’est comme si on ne distinguait plus moralement l’intervention médicale qui supprime la douleur physique, qui peut contribuer à hâter la fin de vie puisque le médecin respecte en même temps la volonté du patient de cesser un traitement qui prolongerait la vie sans espoir de guérison. On préfère l’injection létale qui entraine la mort plus ou moins immédiate.

Pourtant beaucoup de médecins, d’infirmières, d’aidants naturels témoigneront que le manque de compassion, le sentiment d’être devenu un poids pour les siens et la société, sont déterminant dans la démarche du patient en fin de vie.

Je trouve navrant qu’au lieu de développer les soins palliatifs pour qu’ils soient accueillis et efficaces partout, on s’attaque au bien par excellence qu’est la vie et qu’on démissionne devant la mort.

Je n’ai pas trouvé mieux pour finir que de citer Jean Leonetti qui a été le penseur de la loi française sur la fin de vie!

« Si l’on demande aux Français quelle est la plus « belle mort », ils disent qu’ils veulent mourir très vieux dans leur sommeil. Car contrairement à la mort chrétienne que je vois venir et à laquelle je me prépare, la société moderne souhaite une mort inaperçue. »

Mais au-delà de ces considérations, nos sociétés occidentales ont oublié la mort et en ont fait un tabou. Pour s’en débarrasser, elles l’ont médicalisée. C’est le fait d’une humanité qui n’accepte pas sa mort et qui, paradoxalement, l’anticipe pour ne pas avoir à la subir. Or, contrairement à la souffrance, la mort n’est pas un problème médical, c’est un problème intime existentiel de société. Et ce n’est pas le rôle de la loi de régler le problème de la mort.

Je crois que les moments qui précèdent la mort servent à quelque chose. Ce sont des moments qui préparent et apaisent la personne qui s’en va et qui lui permettent peut-être d’accepter sa finitude sans révolte. Sans compter que ces moments jouent un rôle fondamental pour ceux qui restent. Nous portons toute notre vie la cicatrice de la mort de l’autre. « Seigneur, vous m’avez fait puissant et solitaire, laissez-moi m’endormir du sommeil de la terre » écrivait Alfred de Vigny.

+Maurice Couture, S.V.
Archevêque émérite de Québec

Attentat d’Orlando: messe à Québec ce samedi 18 juin à 16h

Geste de solidarité chrétienne à Québec
après l’attentat d’Orlando

Unis dans la prière avec le peuple des États-Unis et
les personnes homosexuelles et leurs familles durement éprouvées

Messe à l’église Saints-Martyrs-Canadiens
Samedi à 16 h

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En communion de prières avec les familles des personnes décédées ou blessées, dont plusieurs personnes homosexuelles, lors du crime haineux du 12 juin à Orlando, aux États-Unis, l’Église catholique de Québec invite la population à prier pour toutes les personnes touchées par cette tragédie lors d’une messe célébrée à 16 h ce samedi 18 juin à l’église Saints-Martyrs-Canadiens (955, avenue De Bienville). La célébration sera présidée par le cardinal Gérald Cyprien Lacroix, accompagné par l’abbé Pierre Gingras, curé de la paroisse Saint-Jean-Baptiste.

Le cardinal Lacroix, archevêque de Québec, a réagi aujourd’hui à cette tragédie : « Au nom de notre grande famille diocésaine, je tiens à exprimer le soutien de nos communautés chrétiennes et adresser nos prières à Dieu pour nos frères et sœurs durement éprouvés par cet attentat à Orlando, plus spécialement aux victimes, à leurs familles et aux personnes homosexuelles, particulièrement visées. La violence ne doit pas avoir le dernier mot. En communion de prières avec le peuple des États-Unis. »

Lettre ouverte du cardinal Lacroix: revue de presse

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Voici une revue de presse suivant la médiatisation de la lettre ouverte du cardinal Lacroix, « Aide à mourir » : pas de date butoir pour la dignité.

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Publication de la lettre ouverte en page 23 du Soleil du 30 mai et en ligne
http://www.lapresse.ca/le-soleil/opinions/points-de-vue/201605/29/01-4986235-aide-a-mourir-pas-de-date-butoir-pour-la-dignite.php

Journal de Québec http://www.journaldequebec.com/2016/05/30/le-cardinal-lacroix-craint-une-banalisation-de-laide-medicale-a-mourir

TVA Réseau 17h http://www.tvanouvelles.ca/2016/05/30/le-cardinal-lacroix-sinquiete-des-possibles-derives

TVA Québec 18h à 5m21s http://www.tvanouvelles.ca/videos/4919643872001

TVA Réseau 22h – entrevue avec Sophie Thibault à 9m32s http://www.tvanouvelles.ca/videos/4919880882001

Téléjournal 18h ICI Radio-Canada Télé Québec à 14m26s http://ici.radio-canada.ca/widgets/mediaconsole/medianet/7536810

La Croix http://www.la-croix.com/Religion/Monde/L-archeveque-de-Quebec-inquiet-de-la-legalisation-de-l-aide-medical-a-mourir-2016-06-01-1200764886

Catholic Register http://catholicregister.org/item/22414-cardinal-lacroix-warns-of-euthanasia-dangers

The Tablet http://www.thetablet.co.uk/news/5625/0/support-those-at-risk-of-euthanasia-so-they-choose-to-live-says-quebec-cardinal

CBC http://www.cbc.ca/news/canada/montreal/quebec-cardinal-lacroix-assisted-dying-1.3608663

Huffington Post Québec http://quebec.huffingtonpost.ca/cardinal-gerald-lacroix/aide-medicale-a-mourir_b_10205220.html

Huffington Post Canada http://www.huffingtonpost.ca/cardinal-gerald-lacroix/assisted-dying-deadline_b_10205426.html

Radio-Galilée http://radiogalilee.com/aide-a-mourir-pas-de-date-butoir-pour-la-dignite/

Télévision Sel + Lumière http://seletlumieretv.org/blogue/eglise-au-canada/lettre-ouverte-du-cardinal-lacroix-aide-a-mourir-pas-de-date-butoir-pour-la-dignite
Zenit
https://fr.zenit.org/articles/canada-aide-a-mourir-lettre-ouverte-du-card-lacroix/

LifeSiteNews https://www.lifesitenews.com/news/quebec-cardinal-fight-euthanasia-by-offering-compassion-to-the-dying

Présence info http://presence-info.ca/article/medecine/-on-demeure-digne-jusqu-a-la-fin-assure-l-archeveque-de-quebec

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Lettre ouverte du cardinal Lacroix – « Aide à mourir »: pas de date butoir pour la dignité

Vitrine_Aide-a-mourir2Pour la version vidéo de la lettre
Pour la version anglaise de la lettre

LETTRE OUVERTE DU CARDINAL LACROIX

« Aide à mourir » : pas de date butoir pour la dignité

Le 6 juin prochain, la décision de la Cour suprême du Canada concernant l’« aide médicale à mourir » prendra effet avec ou sans loi fédérale pour l’encadrer.

L’adoption de la loi C-14 ou l’entrée en vigueur de la décision Carter, donnera certainement lieu à des recours judiciaires afin d’élargir la portée de l’euthanasie au Québec, accessible chez nous depuis déjà 5 mois. Des pressions viendront également pour recourir au suicide assisté, tel que défini par C-14 : « de prescrire ou de fournir une substance à une personne, à la demande de celle-ci, afin qu’elle se l’administre et cause ainsi sa mort. »

Je désire m’adresser aujourd’hui particulièrement aux personnes affectées « de problèmes de santé graves et irrémédiables (y compris une affection, une maladie ou un handicap)1 » causant des souffrances persistantes qui lui sont intolérables.

La vie que vous avez reçue, le souffle qui vous habite, la personnalité qui vous caractérise sont empreints de beauté, de noblesse et de grandeur. L’amour reçu, l’amour donné sont toujours présents et font de vous, comme de chacun de nous, des êtres revêtus d’une grande dignité en toutes circonstances. Ce que vous avez été, ce que vous êtes maintenant requièrent, entre autres, le respect, l’accompagnement et des soins appropriés pour vous aider à grandir jusqu’à la fin.

Afin de respecter la primauté de la vie, l’Église catholique s’oppose fermement à l’euthanasie et au suicide assisté. Elle déplore que tous les scénarios envisagés par le gouvernement fédéral permettent éventuellement à un nombre croissant de personnes de demander à mettre fin à leurs jours.

Je le répète souvent, la position de l’Église n’est pas de valoriser la souffrance. Oui, la foi peut lui donner un sens, mais les chrétiens et chrétiennes, tout comme Jésus, souhaitent l’éviter lorsque cela est possible : « Père, si tu le veux, éloigne de moi cette coupe ; cependant, que soit faite non pas ma volonté, mais la tienne » (Luc 22, 42). J’ai la ferme conviction que Dieu nous aime d’un amour éternel, tels que nous sommes ici et maintenant, et ce, jusqu’à notre mort où il nous accueillera les bras grands ouverts. Il suffit d’écouter sur notre webtélé diocésaine ECDQ.tv la récente conférence de notre archevêque émérite Mgr Maurice Couture pour s’en convaincre.

D’ici le 6 juin prochain, je nous lance collectivement un grand défi. Vous connaissez sûrement une personne qui pourrait se reconnaître dans les critères québécois et (bientôt) canadiens d’accessibilité à l’aide médicale à mourir. Écoutez et accueillez jusqu’au bout l’expression de sa souffrance, de sa peur. Dites-lui qu’elle a du prix à vos yeux, qu’elle pourra toujours compter sur votre présence. Rappelez-lui votre amour inconditionnel.

Les demandes d’aide à mourir s’effacent habituellement lorsque les personnes souffrantes sont bien accompagnées. Ce sont les médecins et le personnel soignant en soins palliatifs qui me l’ont partagé à maintes reprises. Je les remercie de poursuivre leur rôle dans le nouveau contexte législatif au Québec. Leurs efforts pour soulager la souffrance physique et morale portent de réels fruits et les investissements en soins palliatifs doivent se poursuivre. Pour celles et ceux d’entre eux (toujours une majorité) qui s’opposent à l’euthanasie, leur objection de conscience doit être protégée. Si un médecin ne souhaite pas référer un patient vers sa mort médicalement provoquée, son choix doit être respecté sans remise en question.

Merci également à tous les proches aidants. Les débats actuels risquent de faire oublier leur dévouement, leur courage, leur force, mais surtout leur sens de l’autre et du respect de la vie. Ces personnes ont énormément besoin d’être reconnues et soutenues.

Mon accompagnement de personnes en fin de vie me confirme qu’il est périlleux d’accorder la permission de provoquer la mort d’une autre personne, même avec son consentement. Non seulement une loi dicte, mais elle éduque et elle imprime la revendication du droit et la suggestion du devoir. Avec le temps, les moeurs sont affectées et la rareté du geste cède le pas à l’habitude C’est, à mon humble avis, un bien triste « progrès ». Nous avons la responsabilité, la mission d’accompagner avec douceur et tendresse la vie de nos proches qui souffrent, et ce, sans recours à une loi qui incite à la mort. Dans ce contexte, nous sommes invités à prévenir ce mode suicidaire en choisissant de reconnaître la dignité de la vie.

Cardinal Gérald C. Lacroix
Archevêque de Québec
30 mai 2016

1 Description correspondant à la décision de la Cour suprême canadienne qui amendera le 6 juin notre code criminel pour offrir « une aide médicale à mourir ».

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Revue de presse

Open letter from Cardinal Lacroix – “Assistance in Dying” : No Deadline for Dignity

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OPEN LETTER FROM CARDINAL LACROIX

“Assistance in Dying” : No Deadline for Dignity

On June 6th, the Supreme Court of Canada’s decision concerning “medical assistance in dying” will take effect with or without a federal law to control it.

The adoption of bill C-14 or the Carter decision’s coming into effect will certainly give place to appeals within the court system to widen the use of euthanasia in Québec, available to its citizens for the past 5 months. Pressures will also be felt to provide assisted suicide as defined by Bill C-14: “the prescribing or providing by a medical practitioner or nurse practitioner of a substance to a person, at their request, so that they may self-administer the substance and in doing so cause their own death”.

Today, I wish to address myself especially to the persons that have “a grievous and irremediable medical condition, (including an illness, disease or a disability) that causes enduring suffering that is intolerable 1 ”.

The life you have received, the breath that sustains you, the personality that characterizes you are imprinted with beauty, nobility and greatness. The love you have received, the love you have given are always present and make you – like all of us – people that are vested with great dignity in all circumstances. What you have been, what you are today require, among other things, respect, accompaniment and appropriate care to help you grow to the very end.

To respect the sanctity of life, the Catholic Church firmly opposes euthanasia and assisted suicide. She deplores that all the scenarios put forward by the federal government eventually allow a growing number of people to ask to end their life.

Oftentimes, I repeat that the Church’s position is not to highlight the value of suffering. Yes, faith can give a sense to suffering, but Christians, just like Jesus, wish to avoid suffering when possible: “Father, if you are willing, remove this cup from me; yet, not my will but yours be done” (Luke 22:42). I am firmly convinced that God loves us with an eternal love, just as we are here and now, and until our death when he will receive us with open arms. Just listen to our emeritus Archbishop Maurice Couture’s recent conference on our diocesan web television ECDQ.tv to be convinced of it.

Until next June 6th, I collectively challenge ourselves. You surely know a person who can recognize him or herself in the Québec and (soon to be) Canadian criteria for access to medical assistance in dying. Listen to that person express to the very end his or her suffering and fear. Tell that person that he or she has a great worth in your eyes and will always be able to count on your presence. Remind him or her of your unconditional love.

The calls for assistance in dying usually disappear when suffering people are well accompanied. Doctors and palliative care personnel have so many times witnessed it to me. I thank them for pursuing their role in this new legislative context in Québec. Their efforts to relieve physical and moral suffering carry real fruits and investments in palliative care must continue. For those who oppose euthanasia – still a majority – , their objection of conscience must be protected. If a doctor does not wish to refer a patient to his medically provoked death, the doctor’s wish must be respected without being questioned.

I also want to thank the caregivers. The present debate puts us at risk to forget their dedication, courage, strength, but also their sense of presence to others and their respect for life. These persons have a great need to be recognized and supported.

My personal journey in accompanying people in end of life situations confirms to me that it is dangerous to allow permission to provoke the death of another person, even with his or her consent. Not only does the law dictate, but it educates and gives a demand of the right and a suggestion of duty. With time, customs are affected and the rarity of the gesture cedes way to habit. In my humble opinion, it is a very sad “progress”. We have the responsibility, the mission to accompany with gentleness and tenderness the life of our close ones who suffer, and that, without recourse to a law that promotes death. In this context, we are invited to prevent this suicidal mode by choosing to recognize the dignity of life.

Gérald C. Cardinal Lacroix
Archbishop of Québec
May 30, 2016

1 This description corresponds to the Canadian Supreme Court’s decision to amend our criminal code by June 6th to offer “medical assistance in dying” .

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Lettre ouverte: nos réfugiés syriens se retrouvent face à un mur

Vous avez peut-être lu ce matin dans le quotidien Le Soleil le cri du cœur de M. Louis-Marie Asselin, président du Comité d’accueil de réfugiés de la paroisse Saint-Joseph-de-Lévis et accompagnateur d’une famille.

Nous vous partageons cette lettre ci-dessous en profitant de l’occasion pour saluer tous les efforts déployés par ceux et celles qui travaillent à l’accueil des personnes immigrantes et réfugiées au sein de notre diocèse.

 

Nos réfugiés syriens se retrouvent face à un mur

M. Louis-Marie Asselin, président du Comité d’accueil de réfugiés de la paroisse Saint-Joseph-de-Lévis et accompagnateur d’une famille. Photo du Soleil prise par Patrice Laroche.

Dans les premiers jours de septembre 2015, nous avons été nombreux à nous émouvoir et à nous indigner à la vue du corps de l’enfant de trois ans rejeté par la mer sur une plage de Turquie. J’en fus. Avec un groupe d’amis de Lévis, nous sommes immédiatement passés à l’action.

Depuis le 20 février 2016, nous accueillons une famille syrienne de sept personnes, dont un membre, un fils de 14 ans, est encore retenu en Allemagne où il avait fui par la voie maritime et terrestre si meurtrière. Aujourd’hui, trois mois plus tard, en tant qu’accompagnateur de cette famille, je suis tout autant indigné devant les murs administratifs auxquels nous nous butons pour leur intégration. J’évoquerai quatre problématiques dans lesquelles nos énergies s’épuisent, confrontées à un constat d’impuissance.

Dans le secteur de l’éducation

Il y a un manque criant de ressources pour la francisation.

À peine trois semaines après eur arrivée, les six membres de la famille commençaient des cours de francisation en milieu scolaire, grâce à l’accueil généreux et chaleureux du personnel de notre commission scolaire. Les deux parents ont pu être inscrits au programme de francisation de l’école pour adultes, mais seulement à temps partiel, soit deux jours par semaine. Les ressources financières pour un temps complet n’étaient pas disponibles, ce qui fut notre première grande déception. La jeune enseignante contractuelle est accueillante, généreuse, efficace, adorée par ses élèves, mais on lui coupe les ailes.

Les deux adolescentes, inscrites à l’école secondaire de leur secteur, recevaient deux avant-midis de francisation spécialisée par semaine, soit au plus cinq heures. Les deux enseignantes, de jeunes contractuelles, sont engagées et dévouées. Les ressources financières ne permettaient pas plus d’heures. Ce programme de francisation est terminé depuis deux semaines pour l’une et la semaine dernière pour l’autre des adolescentes, alors que les progrès sont sensibles. C’est la deuxième déception pour nous, immense. Que faisons-nous à partir du lundi 16 mai pour soutenir l’enthousiasme de nos deux filles à apprendre le français? C’est une catastrophe, nous sommes paniqués : leur francisation est critique pour l’inscription scolaire de septembre prochain.

Je parle pour moi, nationaliste depuis la Révolution tranquille, et si fier de ma langue : au-delà de l’indignation, quelle honte de mon Québec prétendument si fier de ses racines, tous partis politiques confondus!

Solution proposée : que l’on ajuste immédiatement, sans d’infinies palabres, les planifications rigides et les allocations budgétaires associées.

Dans le secteur de la santé

Il y a non-inscription des professionnels au programme spécial du fédéral pour les réfugiés.

Dès les premiers jours de leur arrivée, nous avons dû recourir à des soins dentaires urgents, et il y eut des besoins pressants en lunettes, pour plusieurs membres de la famille, tous soins non couverts par la RAMQ. Malgré de modestes commandites, nous, le comité d’accueil, avons dû payer des factures importantes. Certains soins sont encore en cours, et d’autres sont prévisibles à court terme. Or, fin mars, début avril, nous entendons le premier ministre Trudeau déclarer la prolongation du Programme fédéral de santé intérimaire (PFSI) à l’intention des réfugiés, précisément pour les soins essentiels non couverts par la RAMQ. Mais il est bien spécifié que les factures déjà payées par le patient ne seront pas remboursées, c’est au professionnel à s’inscrire et à facturer le fédéral.

Notre troisième déception est que les professionnels de la santé ne connaissent pas ce programme et n’y sont pas inscrits. Est-il normal que ce soit à nous, simples citoyens, de chercher sur des sites informatiques difficiles les formalités complexes de ce programme gouvernemental, d’en informer un par un les professionnels de la santé de notre milieu et de les convaincre de faire les démarches administratives pour s’inscrire à ce programme fédéral? En situation d’accueil massif de réfugiés, largement publicisé, pourquoi les ordres professionnels (dentistes, optométristes, etc.) ou les structures québécoises du réseau de la santé n’ont-ils pas rapidement informé les professionnels concernés et ainsi empêché que nous, les parrains privés, ayons à assumer des coûts importants que nous n’avons pas à payer? Il n’est pas trop tard pour agir, les besoins sont toujours là.

Dans le secteur des permis de conduire

Il y a une injustice et une humiliation flagrantes constituant un obstacle majeur à l’accès au marché du travail.

La loi spécifie qu’un permis de conduire du pays d’origine est valide pour six mois après la date d’arrivée du réfugié. Pendant cette période, la SAAQ offre une facilité aux réfugiés, à savoir de passer en langue arabe les examens d’obtention du permis québécois. C’est ici que nous avons une quatrième déception. Les ordinateurs de la SAAQ offrent des examens rédigés en une langue arabe incompréhensible à des réfugiés d’origine syrienne. Résultat : l’examen devient une loterie, le candidat connaît échec après échec. Il se sent tourné en dérision, humilié. Il ne lui reste plus comme recours que de suivre, en français, toute la procédure d’obtention du permis, incluant les cours de formation en conduite automobile. Des coûts importants de formation sont impliqués et, surtout, l’accès au marché du travail peut être retardé d’une année ou même plus.

Solution proposée : décréter un moratoire sur la période de six mois, tant que la SAAQ ne sera pas capable d’offrir des programmes d’examens informatisés en arabe syrien. C’est la moindre justice et le moindre respect dus aux réfugiés.

Au niveau des demandes de rapatriement

Le silence radio de CIC (Citoyenneté et Immigration du Canada) concernant les demandes de rapatriement des enfants manquants dans le cas des familles disloquées par la guerre en Syrie est consternant.

Le fils de 14 ans qui a dû fuir vers l’Europe a été localisé dans le sud de l’Allemagne et la famille est en communication avec lui. Le Canada a annoncé une procédure spéciale qui doit permettre le rapatriement au Canada d’un membre manquant de la famille. Avec notre aide, le papa a inscrit vers la fin mars la demande de rapatriement de son fils préalablement inscrit dans la demande d’immigration. Le passage obligé est par le MIDI (ministère québécois de l’Immigration, de la Diversité et de l’Inclusion). Comme il se doit, le MIDI a transmis le dossier au CIC, qui l’a dirigé vers le bureau des visas canadiens situé à Vienne. Il n’y a eu aucun accusé de réception du CIC ni de son bureau à Vienne, et nous n’avons aucun numéro de dossier canadien qui permettrait de suivre son évolution.

Notre cinquième déception est l’impossibilité pour la famille d’avoir la moindre indication sur une date réaliste de rapatriement de leur fils, ni la moindre possibilité de contact avec le bureau qui traite son dossier. On imagine le supplice et la détresse des parents qui ne peuvent planifier l’avenir de leur famille au Québec, ainsi que le désarroi de l’adolescent qui veut revoir sa famille et qui ne sait plus s’il doit plutôt opter pour s’intégrer à la société allemande. La famille doit-elle prévoir son inscription à l’école en septembre ou faut-il imaginer que cet adolescent ne pourra revoir sa famille que dans possiblement quatre ans? Quarante-huit mois est en effet la durée moyenne du traitement d’un dossier au bureau canadien de Vienne, selon le lien informatique fourni dans l’accusé de réception du MIDI. C’est tout simplement inhumain, alors que nous, le comité de parrainage, avons les ressources financières suffisantes pour payer le billet d’avion du fiston, si seulement il obtenait un visa canadien du bureau de Vienne. L’accélération donnée aux formalités d’immigration de novembre à février dernier devrait se traduire en une priorité pour les enfants alors impliqués dans cette course à l’objectif de 25 000 réfugiés.

Les dossiers décrits ici illustrent les contraintes à l’intégration des réfugiés syriens récemment accueillis en notre société. Avant de discourir politiquement de la pertinence d’accroître le nombre que nous accueillerons dans la prochaine année, il faut trouver rapidement des solutions aux problématiques concrètes vécues sur le terrain. Il faut surtout bien saisir que c’est de personnes dont nous parlons ici, avec des visages chargés d’inquiétude et d’espérance. Je veux aussi souligner l’incroyable élan de générosité de notre communauté du grand Lévis pour accueillir notre famille. J’espère faire comprendre l’impuissance d’un comité d’accueil à vaincre les contraintes décrites et surtout l’urgence d’agir. Chaque semaine perdue a des conséquences dramatiques sur le plan humain. À ceux qui sont en situation de pouvoir et de responsabilité d’agir rapidement.

Louis-Marie Asselin
Président du Comité d’accueil de réfugiés de la paroisse Saint-Joseph-de-Lévis et accompagnateur d’une famille

Lancement de « La Joie de l’Amour » par le pape François

AJOUT – Pour lire Amoris Laeticia :
http://w2.vatican.va/content/francesco/fr/apost_exhortations/documents/papa-francesco_esortazione-ap_20160319_amoris-laetitia.html
Résumé officiel:
http://press.vatican.va/content/salastampa/it/bollettino/pubblico/2016/04/08/0240/00534.html#fr

Une conférence de presse le vendredi 8 avril à 13h30 webdiffusée via notre webtélé ECDQ.tv lancera à Québec le fruit de la réflexion pastorale du pape François sur la famille, une exhortation apostolique intitulée « La joie de l’amour », Amoris Laeticia.

Ce document papal très attendu prend sa source du travail accompli lors des synodes sur la famille de 2014 et 2015 à Rome. Invité par le pape François à participer à celui de l’automne dernier, le cardinal Gérald Cyprien Lacroix, archevêque de Québec, livrera lors de cette conférence ses premiers commentaires et observations suivant la lecture de « La joie de l’amour », dont la publication se fera le matin du 8 avril sur le site web du Saint-Siège, www.vatican.va.

Pour l’occasion, il sera accompagné de deux jeunes parents du Diocèse de Québec qui contribuent avec créativité à la réflexion sur la famille au sein de l’Église catholique :

  • Antoine Malenfant, 31 ans, rédacteur en chef du magazine et site Web, Le Verbe. Basé à Québec, ce nouveau média catholique réunit journalistes, artistes et penseurs chrétiens dans un lieu d’expression, de diffusion et d’échange d’idées. Né à La Pocatière et diplômé en sociologie, Antoine est le père de Joseph, Élie, Anne, Esther, Simone et Bernard avec son épouse Marie-Claude.

Cet événement de presse sera diffusé en direct et en différé via la webtélé www.ecdq.tv.

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Une conférence de presse au Vatican lancera officiellement « La joie de l’amour » ce vendredi 8 avril à 5 h 30 (heure de Québec). Webdiffusée via www.youtube.com/vatican.

« La joie de l’amour » sera disponible pour consultation jeudi dès 6 h (heure de Québec) sur www.vatican.va.