La semaine dernière, l’Institut du mariage et de la famille Canada, un think thank (laboratoire d’idées) plutôt méconnu au Québec, a publié un rapport qui remet en question plusieurs aspects du « modèle québécois » : A Québec Family Portrait.

Publié uniquement en anglais la semaine dernière – par simple manque de financement – l’équipe de l’institut a eu la bonne idée de traduire aujourd’hui le résumé/communiqué de l’étude. En voici son contenu :

Le 7 novembre 2011 (Ottawa) – L’Institut du mariage et de la famille a rendu public aujourd’hui une étude sur le Québec intitulée A Quebec Family Portrait. Cette étude, publiée en anglais seulement, dresse un profil statistique de la famille québécoise, notamment dans ses rapports avec l’économie de la province. Elle porte sur divers domaines comme l’économie, la fiscalité, l’éducation, les programmes gouvernementaux relatifs à la famille (dont le régime provincial de garderies) et les taux de fécondité, de mariage, de divorce et de cohabitation.

Ce profil familial révèle que la province est innovatrice en matière de politique familiale et sociale. Il arrive que les résultats soient heureux, mais il arrive aussi qu’ils le soient moins, comme en témoignent les données suivantes :

• Le ratio dette/PIB du Québec est le cinquième plus élevé au monde, les seuls autres pays dont le ratio est plus élevé étant le Japon, l’Italie, la Grèce et l’Islande.

• Les taux d’imposition du Québec sont élevés. Une famille québécoise de deux enfants dont les âges se situent entre 6 et 17 ans et ne disposant que d’un seul revenu annuel de 60 000 $ en 2010 doit acquitter des impôts totalisant 15 437 $, par rapport à 12 429 $ en Ontario et 11 193 $ en Alberta.

• Bien que le taux de fécondité du Québec soit en hausse, il demeure inférieur au taux de remplacement, qui est de 2,1. En 2008, le taux de fécondité du Québec était de 1,74. Compte tenu du vieillissement rapide de la population, il faudrait, pour maintenir les programmes sociaux à leur niveau actuel, une croissance nette de la population.

• En 2010, 63,1 % des enfants au Québec étaient issus d’un couple non marié. Une part substantielle de la recherche internationale indique que le mariage constitue un cadre plus stable que la cohabitation ou la famille monoparentale pour élever des enfants. La forte proportion des enfants nés hors mariage soulève des questions concernant l’effet que la faiblesse de la culture du mariage au Québec pourrait avoir sur la société et l’économie, et ce, aussi bien à l’heure actuelle que dans le futur. « Depuis la Révolution tranquille des années 1960, le Québec s’est lancé dans une expérience radicale de transformation économique et sociale qui a profondément modifié le visage et le caractère de cette province », déclare les auteurs de l’étude, Paul Malvern, Andrea Mrozek et Catherine Benesch. « Plusieurs aspects de la vie du Québec ont changé et la vie familiale a été profondément transformée, comme l’indiquent le faible taux de mariage, le taux élevé de cohabitation et le faible taux de fécondité. »

Le succès ou l’échec de cette expérience aura d’importantes répercussions sur le reste du Canada puisque bon nombre d’autres provinces souhaitent s’inspirer de certaines politiques familiales du Québec, notamment en ce qui concerne son régime de garderie. Selon la chercheuse Andrea Mrozeck, « divers chercheurs ont toutefois conclu au fil des ans que ce régime est de qualité médiocre et qu’il contribue à un niveau élevé de fiscalité et à une absence de choix en matière de garderies. » Elle ajoute que « les autres provinces canadiennes devraient se montrer très prudentes avant d’adopter ce modèle. »

Bien que certains programmes québécois soient très prisés, l’avenir pourrait se révéler problématique. En effet, à défaut d’un réaménagement fiscal de grande ampleur, le Québec pourrait très prochainement ne pas être en mesure d’offrir les prestations sociales qui sont maintenant offertes aux familles. Et en l’absence d’une solide culture du mariage, les réductions éventuelles pourraient avoir de pénibles répercussions sur les Québécois. Des familles solides offrent un très bon filet de sécurité sociale et, lorsque les familles se défont, il est très difficile de surmonter les difficultés qui en découlent. Le gouvernement du Québec aurait intérêt à accorder autant d’attention au déficit des mariages qu’à l’endettement croissant de la province.

« Si jamais l’expérience du Québec en matière d’ingénierie sociale allait à vau-l’eau, la cause en serait vraisemblablement la conjugaison des pressions fiscales résultant de la nécessité constante de remplir les coffres de l’État et des faibles niveaux de fécondité que l’on observe dans la plupart des provinces et territoires canadiens », concluent les auteurs. « Cela dit, à certains égards, le profil familial du Québec ne diffère pas sensiblement de celui du reste du Canada; il est seulement un peu plus accentué. »

On peut télécharger le texte intégral de l’étude ici.

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Quoique l’on peut en penser, ce rapport incisif a le mérite de poser des questions rarement discutées sur la place publique.

Que pensez-vous de ce portrait de la situation qui a été jusqu’à maintenant complètement ignoré des médias québécois? Est-il trop critique envers notre société québécoise? Identifie-t-il des problématiques qui vous tiennent à cœur? Quelles sont les pistes de solution à envisager pour remettre au goût du jour l’engagement (mariage, participation citoyenne et communautaire, etc.)?