Voici le message du 1er mai 2020, préparé par le conseil Église et Société de l’AECQ en collaboration avec des membres de la Table provinciale de pastorale sociale. À forte teneur écologique, il est publié le 22 avril 2020, Jour de la Terre.

La transition énergétique : les travailleurs et travailleuses font partie de la solution

Un vaste mouvement collectif s’est développé au cours des dernières années afin de promouvoir des actions de protection de l’environnement. L’Église du Christ se sait appelée à en faire partie. En ce 1er mai 2020, à l’occasion de la fête internationale des travailleurs et des travailleuses, nous voulons porter notre attention sur les conditions de la transition énergétique et ses impacts sur la vie des gens ordinaires, notamment les travailleurs et travailleuses, ainsi que sur les plus pauvres de notre société. La pandémie de la COVID-19, à laquelle nous faisons face, ne rend que plus urgent l’engagement pour une transition énergétique juste. En effet, le système socio-économique actuel a participé à la propagation du nouveau coronavirus et la transformation de ce système pour plus de justice doit être une priorité lors de la « relance » qui suivra la crise.

Si la sauvegarde de la Terre, notre maison commune, fait partie de la perspective biblique, il faut admettre que les Églises chrétiennes ont tardé à faire des préoccupations écologiques un élément constitutif de l’annonce de l’Évangile et de l’éthique chrétienne. Maintenant que l’on parle de plus en plus de la nécessité d’un « virage vert », de nombreux mouvements citoyens appellent à une « transition énergétique » qui exige une conversion écologique de nos habitudes personnelles aussi bien que de notre système économique et de nos politiques gouvernementales. Le but de ces appels est d’assurer la continuité d’une vie heureuse sur la Terre, en prenant soin de la création pour nous, pour les personnes appauvries et pour les générations futures. Il n’y aura point de transition énergétique véritable sans solidarité internationale.

Avec le pape François, « nous savons que les choses peuvent changer » et nous souhaitons « saluer, encourager et remercier tous ceux qui, dans les secteurs les plus variés de l’activité humaine, travaillent pour assurer la sauvegarde de la maison que nous partageons. Ceux qui luttent avec vigueur pour affronter les conséquences dramatiques de la dégradation de l’environnement sur la vie des plus pauvres dans le monde, méritent une gratitude spéciale. » (Encyclique Loué sois-Tu (Laudato Si’), 24 mai 2015, 13).

Au Québec, plus de 400 municipalités, représentant près de 80% de la population, ont signé la Déclaration citoyenne universelle d’urgence climatique (DUC) et plusieurs sont déjà à l’œuvre dans l’un ou l’autre des chantiers associés à cette déclaration. Plus de 285 000 personnes ont signé le Pacte pour la transition, s’engageant à réduire leur empreinte écologique et de carbone, et le 27 septembre 2019, plus de 500 000 citoyens et citoyennes prenaient part à la plus grande manifestation de l’histoire du Québec. Plusieurs communautés chrétiennes (paroisses, diocèses, communautés religieuses) ont aussi pris des mesures pour une conversion écologique, notamment en lien avec le Réseau des Églises vertes. Tous et toutes, nous faisons partie du problème et nous voulons faire partie de la solution. Cependant, les moyens retenus pour opérer la conversion écologique doivent tenir compte des modifications qu’elle exige, qui peuvent affecter le monde du travail (transport, fabrication), l’augmentation des prix à la consommation, la reconversion professionnelle, etc.

Des groupes seront plus touchés que d’autres par ces transformations, que ce soit en raison de la transition énergétique à vivre ou de l’amplification des conséquences de la crise écologique elle-même. Collectivement, nous avons des responsabilités envers les travailleurs et travailleuses d’industries en déclin ou en transformation, comme par exemple la foresterie, les pêcheries et le secteur de l’énergie; envers les personnes délogées par les désastres naturels ici et ailleurs dans le monde; envers les personnes qui cultivent la terre, vivant au gré des éléments et des accords commerciaux. Seul un effort solidaire et des mesures de transition progressive pourront faire en sorte que les personnes les plus vulnérables ne soient pas celles qui sortiront appauvries par ces transformations.

Des changements sont possibles si nous abandonnons de vieilles habitudes pour adopter de nouvelles façons de produire et de consommer, en éduquant les personnes et en prenant soin de celles qui entrent plus lentement dans une autre manière d’organiser la vie. Ces transformations sont l’occasion de créer du neuf : des municipalités plus dynamiques et plus vertes; des campagnes aux sols revitalisés et aux activités diversifiées; des circuits de transport plus courts pour livrer les biens de consommation courants; des transports publics efficaces et abordables dans toutes les régions du Québec; des bâtiments rénovés plus écologiques; des centres-villes dont la densification soit plus responsable, et attentive à la marginalisation des personnes appauvries; une économie moins dépendante des énergies polluantes et non-renouvelables; des services publics plus ajustés aux besoins locaux; une société plus accueillante pour les personnes déplacées et plus inclusive des diverses contributions citoyennes.

Jésus a affirmé : « Je suis venu pour que les gens aient la vie, et que cette vie soit abondante » (évangile selon saint Jean, 10,10). Ses attitudes et ses actions envers les personnes inspirent encore aujourd’hui un appel à la conversion et annoncent l’instauration d’une Terre nouvelle où les humbles sont élevés et les puissants, renversés de leurs trônes (évangile selon saint Luc, 1,51-53). Face à l’urgence climatique, nous sommes fondamentalement devant des enjeux de salut et de vie. C’est pour cela que la communauté croyante catholique ose dire : Que les changements dans lesquels nous sommes engagés ne laissent personne derrière!

Ce message a été produit par le Conseil Église et Société en collaboration avec la Table provinciale de pastorale sociale.

Questions pour aller plus loin :

  1. Sur quel aspect de la transformation énergétique vous engagez-vous déjà, individuellement? Sur lequel souhaitez-vous agir?

  1. Quelles interventions écologiques votre communauté chrétienne a-t-elle mise en œuvre? Par exemple, votre paroisse appartient-elle au Réseau des Églises vertes?

  1. Faites-vous partie des groupes ou des personnes à risque dans cette transformation énergétique? Si oui, de quelles solidarités avez-vous besoin?

Quels sont les groupes ou les personnes à risque dans votre milieu, et comment en être solidaire?

  1. Selon votre expérience, quel état d’esprit est le plus favorable pour faire face aux défis que vous entrevoyez? Comment le développerez-vous?