Lien vers notre déclaration du 23 février 2017

Après discussions au cours des derniers jours, voici la réponse que nous avons reçu des autorités du CHU:

Notre établissement possède sans l’ombre d’un doute un patrimoine religieux qui témoigne de son histoire, que nous respectons et valorisons, mais nous sommes tenus à l’obligation de neutralité religieuse de l’État.

Comme la mission première de notre établissement est de donner des soins et services de santé, nous nous devons de respecter en premier lieu les droits de nos patients, lesquels sont en quelque sorte captifs de l’institution. À cet égard, la Commission des droits et libertés de la personne et des droits de la jeunesse a une position claire :

[La] présence dans une institution publique d’un symbole religieux, tel qu’un crucifix ou une croix, ne soulève pas de problème particulier du point de vue de la Charte, à moins que ledit symbole n’acquière un caractère coercitif en raison du contexte dans lequel il s’inscrit. Ainsi, lorsque la clientèle de l’institution est vulnérable, parce que captive, jeune ou influençable, comme dans une école, par exemple, alors l’exposition à un symbole religieux, tel qu’une croix accrochée au mur, peut revêtir un caractère contraignant incompatible avec les droits et libertés de la personne. »

C’est pourquoi nous estimons devoir répondre à la plainte reçue et ne pouvons envisager le retour du crucifix, même avec une note d’interprétation. Nous avons la responsabilité de respecter ces principes, même si une certaine partie de la population pense autrement.

Une plaque rendant hommage au travail d’édification de la communauté des Soeurs de la Charité est déjà présente dans le hall d’entrée de l’Hôpital. Les prochains travaux de rénovation du hall d’entrée nous donneront par ailleurs l’occasion d’encore mieux mettre en valeur l’apport historique légué par les religieuses dans l’édification de l’Hôpital du Saint-Sacrement.

Nous sommes très déçus de la réponse et de l’explication qui ne considèrent aucunement l’aspect patrimonial culturel, historique et religieux de ce crucifix.

Le cardinal Gérald Cyprien Lacroix, archevêque de Québec, tient à y réagir par cette déclaration:

Façonner le sens de notre histoire collective

Depuis quelques jours, nous sommes en conversation avec le CHU de Québec pour trouver une solution créative au retrait du crucifix de l’Hôpital du Saint-Sacrement. Voici la proposition que nous avons partagée publiquement. J’ai appris hier que le CHU maintient sa décision sans prendre en compte la dimension historique et religieuse de ce crucifix, en tant qu’élément de notre patrimoine culturel. Je crois sincèrement que c’est un manque de respect envers la population et à l’égard de l’histoire de cet établissement de soins fondé en 1927 par les Sœurs de la Charité de Québec, au nom de leur foi dans le message de Jésus Christ. Comme de très nombreux Québécois et Québécoises, j’exprime ma vive déception au sujet de cette décision, mais j’ai peine à croire que ce soit la fin de l’histoire. Alors que nous parlons de tolérance, d’accueil, de respect de la différence et d’ouverture, le retrait du crucifix de l’Hôpital du Saint-Sacrement exprime tout le contraire.

Je doute que les motivations ayant conduit à la décision de retirer ce crucifix du hall d’entrée de l’Hôpital du Saint-Sacrement soient bien fondées. J’y vois plutôt un manque de sensibilité à l’endroit de notre peuple et de son histoire, ainsi qu’un manque de respect envers ces femmes religieuses qui ont fondé l’Hôpital  et qui y ont œuvré pendant plusieurs décennies. J’admire toutes celles et ceux qui ont osé faire connaître leur mécontentement avec respect et conviction. Si nous laissons passer le retrait de ce crucifix sans réagir, quelle sera la prochaine cible?
Je crois sincèrement que le peuple québécois est capable de faire la part des choses. La vie et l’œuvre de nos prédécesseurs, qu’ils soient des religieux ou des personnes laïques, n’ont sans doute pas été parfaites. Cela ne nous empêche toutefois pas d’être fiers et respectueux de notre passé. Ce serait nous appauvrir que de vouloir effacer toutes les traces de notre histoire et les signes de notre identité. J’ose croire que les responsables de nos hôpitaux ainsi que d’autres institutions publiques poursuivront leur réflexion en vue de faire les bons discernements, libres de toute idéologie laïciste. Il importe de distinguer la laïcité de la doctrine laïciste, pour favoriser une laïcité ouverte. Renier cet aspect de notre histoire serait un appauvrissement de ce que nous sommes comme peuple.

Soyons nombreux et nombreuses à faire connaître aux autorités compétentes notre insatisfaction devant la décision du CHU, car les gestes d’aujourd’hui façonnent la manière dont nous transmettrons le sens de notre histoire collective aux générations futures et aux nouveaux arrivants.

Cardinal Gérald Cyprien Lacroix
Archevêque de Québec